Guillaume Le Touze

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Attraction… [Force qui tend à attirer les êtres vers quelqu’un ou vers quelque chose]. Le titre du nouveau roman de Guillaume Le Touze embrasse bien son univers. Sensuel, intérieur, entremêlant comportements irrésistibles et attitudes instinctives.

En tête du curriculum vitae de Guillaume Le Touze, on lit : « maquettiste, romancier, scénariste ». C’est parce qu’il faut bien se plier aux lois réductrices du genre : le parcours du romancier n’affiche en réalité pas moins de dix métiers ! Animateur d’ateliers, éditeur, correcteur, lecteur, rédacteur, acteur, chargé de mission pour un musée, il le fut ou l’est encore. L’homme se situe dans l’écriture et son partage.

36 ans et déjà une vingtaine d’ouvrages publiés ces treize dernières années, dont 8 romans jeunesse, 3 pièces de théâtre et quelques nouvelles… Aujourd’hui sans éditeur jeunesse attitré, Guillaume Le Touze écrit moins, prend son temps. Y reviendra-t-il ? Avec lui, l’enfance n’est jamais très loin, un soupçon de nostalgie plane.

Ce rapport privilégié à l’enfance est immanquablement présent dans son dernier roman, qui paraît en janvier chez Actes Sud. Serait-ce un roman de réconciliation avec soi-même ? Rien n’est moins sûr. Un polar peut-être ?… Guillaume Le Touze joue de la réalité : perception décollée ou mythomanie seraient-elles synonymes de clairvoyance ?

« J’ai appris à être dans l’instant, à rester avec mes personnages. »

Que ce soit lorsqu’il écrit ou quand il anime des ateliers, Guillaume Le Touze ne donne jamais de réponse, il suggère ; il ne veut pas résoudre, il accompagne. Cette manière de poser sans décortiquer, il la vit comme une lutte contre le déterminisme. Demeurer dans l’intériorité, voilà le creuset.
Il aime à se servir du corps pour aborder la profondeur psychologique de ses personnages : lesquels hument, ressentent, perçoivent… Une façon d’écrire qui lui vient du théâtre – il a quelques cours et rôles à son actif. Prégnance du présent ; il fait partie de ceux qui ne connaissent la fin de leur roman qu’avec ses protagonistes.

Aujourd’hui, Guillaume Le Touze entend mobiliser le corps également lors des ateliers d’écriture qu’il anime. Pour écrire, il faut être capable de rester assis deux heures de suite, rester sur soi. Voilà qui n’est pas si naturel. Cette mise en jeu du corps, à travers la respiration, le rythme, le réchauffement des mains, le ressenti des doigts… participe à l’entrée en concentration destinée à favoriser les associations mentales. Alors seulement s’ouvre un espace imaginaire. Ainsi se déplace la représentation de l’écriture.
En guise d’introduction, la lecture à haute voix est aussi un mode d’approche étonnant. Le plus souvent, ses apprentis se veulent « dans le ton ». Il les conduit à être dans la texture ; celle des mots. Savoir être neutre pour être évocateur.

Plus les participants ont besoin de se construire, plus les ateliers passionnent le romancier.
Les enfants, parce qu’ils sont plus proches des sensations, des perceptions, de l’imaginaire, et parce qu’ils réservent des surprises extraordinaires, découvrant des univers parfois délirants.
Les adolescents, eux, révèlent leurs interrogations sur le monde grâce à des consignes choisies (comme : aujourd’hui, les garçons écrivent sous « elle », et les filles sous « il »).
Les personnes en difficulté, parce qu’il y a de la confiance à redonner.
Les ateliers, tous, permettent de changer les regards, de donner une place à ceux qui n’en ont pas.

Vit-il les ateliers d’écriture comme un don de soi ? Non, comme un échange véritable : on y parle sur un objet commun. Ce qui permet à Guillaume Le Touze de faire le point sur ses propres pratiques. A chaque fois, il en ressort doté d’une nouvelle énergie, et d’une nouvelle envie d’écrire.

Arlésien depuis quelques années, après un bref passage dans le monde audiovisuel, il aspire maintenant à replonger dans les réseaux de proximité. Gageons qu’en tant qu’animateur d’atelier, en free lance dans l’édition ou les musées, il saura ouvrir un éventail des possibles. Comme pour ses personnages.