Wildproject, la révolution écologique en 100 titres

« Wild » renvoie au sauvage intérieur, à ce que notre vie intime a d’incompatible avec le mode d’organisation actuel du monde. En effet, l’écologie, explique le directeur, « est la réfutation de l’idéologie de la Plantation de canne à sucre - cette plantation, matrice de l’organisation industrielle du monde qui détruit les sociétés humaines et la vie sur la Terre. »

2009-1019 : La réintroduction de la pensée écologique en France

Pour faire face au retard de la France en matière d’écologie, la traduction de textes fondateurs étrangers de la deuxième moitié du 20^e siècle pour permettre la réintroduction de cette pensée est apparue évidente pour Baptiste Lanaspeze. L’aventure a donc débuté avec la réédition d’un livre-manifeste qui a lancé le mouvement écologiste en 1962, Printemps silencieux de Rachel Carson, vendu à ce jour à 20 000 exemplaires par l’éditeur.

Wildproject s’appuie depuis sa création sur un conseil scientifique, un réseau de chercheuses et de chercheurs qui témoignent de leur confiance dans la maison. Des compagnes et compagnons de route, à l’intersection des questions décoloniales et écologiques, parmi lesquels : Émilie Hache (éco féministe), Pascal Menoret (fondateur de la collection “Le monde qui vient”), Baptiste Morizot (maître de conférences en philosophie et auteur de Manières d’être vivant, Actes Sud, 2020),

Wildproject qui se battait dans l’ombre à ses débuts pour publier, se faire une place en librairie, et ce, sans pilonner et en imprimant en France, réussit en 10 ans à publier 80 livres fondamentaux.

Les objectifs de sensibilisation ont clairement été atteints, preuve en sont les tables dédiées en librairies, la multiplication des collections sur le sujet ou encore l’explosion de la communauté qui s’intéresse au croisement littérature/monde vivant. Un master est même dédié à Aix-Marseille Université à l’ écopoétique et la création  ; il rassemble une soixantaine d’étudiants, sous la direction de Jean-Christophe Cavallin. Wildproject y a par ailleurs participé en proposant des ateliers sur 2 années.

Un catalogue et une façon d’éditer qui se répondent

Avec une dizaine de sorties par an, le catalogue de Wildproject, qui compte 100 titres, s’articule autour de 5 collections :

• « Domaine Sauvage », ouvrages incontournables et essais fondateurs de la pensée écologiste
• « Tête nue » née pour représenter en France le pendant du genre américain « Nature Writing » (l’écriture sur la nature). La révolution écologique ne pouvait pas être que conceptuelle, il fallait introduire du narratif, autour de l’écriture des lieux et de la dimension poétique de l’écologie.
• « Le monde qui vient » croise les questions écologiques et décoloniales.
• « À partir de Marseille » regroupe des ouvrages sur les enjeux d’écologie urbaine.
• « Petite bibliothèque d’écologie populaire », collection de poches lancée en 2019, constituée des “classiques” du catalogue de Wildproject, vendus entre 8 et 12 euros. mais aussi des inédits, des manuels… - un mélange de textes fondateurs, expérimentaux, de littérature, un peu comme un échantillon représentatif de la maison.

Tous les titres sont défendus auprès des libraires par Belles Lettres Diffusion Distribution, qui est bien adapté au contenu et aux dimensions du catalogue.

La question d’avoir un contenant qui fait écho au contenu est vite apparue essentielle. Lorsqu’il a fallu concevoir le site internet de Wildproject, le développeur Julien Bidoret, a cherché à faire appaître dans le design la radicalité conceptuelle et politique de la maison. Ainsi la navigation se fait par défaut sans faire apparaître les images des couvertures, ce qui limite considérablement l’empreinte énergétique, il est cependant possible de choisir de les afficher.

Pour réduire au maximum le pilon (moins de 2 % des ouvrages imprimés), des opérations de vente à prix réduit « Sauvés du pilon » ont été mises en place. Inspirées par un confrère, Rue de l’échiquier elles s’appuient sur la récupération des ouvrages défraîchis.

Objectif de la 2^e décennie : « mettre en œuvre la société écologique de demain »

Après 10 années de solitude aux commandes de sa structure, Baptiste Lanaspeze rencontre successivement 3 personnes grâce à qui une équipe prend forme.
D’abord Marin Schaffner, ethnologue de formation, traducteur et éditeur, aussi auteur d’Un sol commun : lutter, habiter, penser, livre d’entretiens réalisé pour les 10 ans des éditions Wildproject, qui cofonde la collection de poche Petite bibliothèque d’écologie populaire   de la maison. Il anime aussi de nombreux ateliers d’écriture et des interventions pour sensibiliser le plus grand nombre aux sciences sociales.
Puis Georgia Froman, traductrice et éditrice américaine, chargée de développement et des droits étrangers. Enfin, l’éditrice Gayané Zavatto, co-rédactrice en chef de la nouvelle revue Mille Cosmos.

Après une première décennie consacrée à importer en France les pensées de l’écologie, la maison se donne pour vaste programme « la mise en œuvre de la société écologique de demain ». Avec Anaïs Massola, qui a fondé la librairie parisienne Le Rideau Rouge, et Wildproject, Marin Schaffner crée l’ Association pour l’écologie du livre qui œuvre de façon interprofessionnelle sur les questions d’éco-responsabilité et de bibliodiversité. Qu’est-ce que cela voudrait dire de fabriquer, publier et diffuser les livres de façon écologique ? 250 acteurs y sont déjà affiliés et plusieurs types d’actions sont menées, notamment des ateliers d’écriture et de sensibilisation en région, des formations au « rayon écologie » pour libraires et bibliothécaires, des rencontres et événements etc.

2022 s’annonce bien remplie avec les 60 ans de Printemps silencieux de Rachel Carson, mais aussi l’arrivée de la revue Mille cosmos, créée par Claire Fau, Maxime Lancien et Gayané Zavatto, hébergée par Wildproject. Parmi les parutions à venir, un ouvrage fondateur de la biologiste Lynn Margulis, Microcosmos, ou encore Monocultures de l’esprit de l’écoféministe Vandana Shiva en septembre 2022.