Dernier Rempart franchit le "Cap"

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C’est le 23 juin 2023 que la Librairie du Cap a ouvert ses portes dans le centre commercial Cap 3 000 à Saint-Laurent-du-Var. Le projet s’étend sur près de 450 m2, emploie 13 libraires et dispose déjà de quelque 40 000 références. Depuis la fermeture en 2009 de la librairie Panorama du livre, puis de la librairie spécialisée BD Album en 2013, la ville n’hébergeait plus ce type de commerce.

Devanture de la librairie du Cap, librairie située dans la galerie marchande du centre commercial Cap 3000, situé à Saint-Laurent-du-Var.

Si vous aviez dit il y a deux ans à Laurent Parez - acteur de l’union des librairies Comics Strip Café et Masséna, devenues Dernier rempart, à Antibes - qu’il se lancerait aussi vite dans un nouveau projet, il vous aurait répondu qu’il n’avait pas les fonds et qu’il n’y croyait pas. Et pourtant, c’est bien lors de cette fusion que tout s’est joué : « En rassemblant nos deux structures, nous avons choisi de vraiment spécialiser l’ex Comics Strip Café en librairie manga et ludothèque. Nous avons donc recruté Méline Desplanques, spécialiste du genre, qui travaillait auparavant au sein de Cap 3 000. Elle entendait souvent les clients parler de l’ancienne librairie, Panorama, et dire à quel point cela leur manquait. Au fur et à mesure, l’idée a germé… ».
Et c’est ainsi que quelques mois plus tard, de premiers rendez-vous sont pris avec les gérants du centre commercial : « L’engouement était très fort de leur côté. Depuis la fermeture de Panorama, la clientèle les sollicitait en effet énormément. Au départ, on ne pensait qu’à proposer des BD/mangas, mais on a finalement accepté d’ouvrir un magasin généraliste. Quand un local s’est libéré, ils nous ont appelé et nous avons relevé le défi ».

Défi, car dans l’« ADN » des libraires indépendants, la perspective de s’installer dans un tel lieu peut parfois ressembler à un avilissement et très rares sont ceux qui franchissent ce pas. C’est généralement le cas quand les centres-villes sont difficiles d’accès ou quand les mobilités territoriales obligent les habitants à se rendre dans des galeries marchandes, comme en montagne et dans certains territoires ruraux ou des zones péri-urbaines.
Autre challenge de taille, cocher toutes les cases demandées : « Il a fallu répondre à de très nombreux cahiers des charges et normes tant dans les matériaux à utiliser, les espaces et équipements de sécurité, le placement des meubles ou bien encore l’agencement intérieur. Nous avons dû faire appel à une architecte spécialisée ».
Dernière étape, réussir à trouver le capital nécessaire : « Il a été difficile de convaincre du bien-fondé de notre démarche. Nous avons eu de nombreux échanges avec le Centre national du livre tant sur la pertinence du lieu, le projet, le fonds que le financement. Mais une fois qu’ils ont été convaincus, tout s’est libéré et aujourd’hui nous tenons presque nos objectifs. D’ailleurs, sans l’aide du CNL dans la négociation du bail, nous n’aurions pas abouti à un accord. »

Un peu craintive au départ, toute l’équipe est aujourd’hui heureuse de cette implantation : « Le public n’est pas complètement le même que dans les centres-villes ; les personnes qui se rendent à Cap 3 000 ne viennent pas forcément pour la librairie, mais pour la pluralité des commerces, ils passent par hasard, flânent. Ici, vous vendez beaucoup de new romance et de young adult, mais vous échangez aussi autour de Rilke et Kundéra. Ça a aussi permis à certains de nos collaborateurs de progresser sur des thématiques qu’ils ne faisaient que survoler ».
Loin d’être perdus, certains clients historiques fréquentent d’ailleurs les deux lieux et profitent de ces synergies. « Ça nous a surpris, mais la principale différence entre les deux se sent au niveau des animations. Vous faîtes une animation Tchoupi sur une journée, ça ne désemplit pas et les employés vous réclament des bouchons d’oreille. Les mêmes rencontres à Antibes ne connaissent pas ce succès. À l’inverse, vous réunissez 100 personnes à Dernier rempart autour de la philosophie du vin et d’une dégustation, quand le même évènement à la librairie du Cap ne rencontre que peu d’enthousiasme ». Un groupe de lecture mensuel et des ateliers enfants sont également organisés et la création de clubs BD et SHS est en cours de réflexion.

Ici, le choix des libraires n’a pas été de mutualiser la gestion des deux structures. Les entités s’avèrent en effet complètement autonomes. Si la volonté première du gérant relève avant tout de sauvegarder l’indépendance financière des projets, il souhaite aussi tester d’autres solutions : « Très souvent dans la vie d’une librairie vous mettez en place des outils et par manque de temps vous n’en changez jamais ou les faîtes à peine évoluer. Dans notre cas, on s’est dit pourquoi ne pas tester deux logiciels de gestion différents, d’autres prestataires, etc. ça implique qu’on ne peut pas avoir de cartes de fidélité communes et que les flux de commandes ne sont pas les mêmes, mais c’est tout de même très intéressant et ça permet de comparer objectivement ».
Prochaine intention de la librairie, faire évoluer le site internet afin de le rendre encore plus attractif.

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