Droit et pratique de la rémunération de l'auteur

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Les diffuseurs d’oeuvres littéraires, les organisateurs de manifestations faisant intervenir des auteurs, se trouvent fréquemment confrontés à la question de savoir comment rémunérer les auteurs dans le respect des droits de ces derniers et des réglementations fiscales et sociales.

Les écrivains, traducteurs ou illustrateurs sont souvent sollicités pour intervenir dans le cadre de manifestations publiques et de même sont rarement au fait des dispositifs légaux les concernant.

Le mode de rémunération dépend de la nature de l’intervention de l’auteur.
Si l’auteur fait une lecture publique de son oeuvre ou publie à l’issue du salon le texte de son intervention, l’auteur sera rémunéré en droits d’auteur.

1 - Nature de la rémunération

En principe, l’auteur a droit à une rémunération proportionnelle aux recettes
provenant de la vente des exemplaires reprenant son intervention.

La jurisprudence a précisé que le prix servant de base au calcul des redevances d’auteur doit être celui effectivement payé par le public pour accéder à l’oeuvre, déduction faite de la TVA.

Comme dans tous les contrats d’exploitation de droits d’auteur, les parties sont libres de fixer comme bon leur semble le taux de la rémunération proportionnelle, sauf nullité de la stipulation fixant un pourcentage dérisoire.

Cependant, en pratique, la rémunération d’une lecture publique donne lieu au
versement d’un forfait. En effet, la rémunération de l’auteur peut être évaluée
forfaitairement dans certaines hypothèses, notamment lorsque la base de calcul de la participation proportionnelle ne peut être pratiquement déterminée (par exemple : pas de décompte des entrées, entrées gratuites) ou quand la nature ou les conditions de l’exploitation rendent impossible l’application de la règle de la rémunération proportionnelle (par exemple en cas de lectures successives, ou de droit d’entrée réglé par le public pour l’ensemble des événements de la manifestation).

Il est important de souligner que si les parties sont convenues d’un forfait anormalement bas, l’auteur dispose d’une action en révision de forfait, afin de voir son forfait réévalué par le juge. Cette possibilité de rétablir un certain équilibre n’est pas ouverte à l’auteur qui aurait conclu un contrat prévoyant une rémunération proportionnelle faible.

Rappelons enfin que l’auteur peut céder ses droits à titre gratuit.

2 - Sur le plan fiscal

Qu’il s’agisse de forfait ou de pourcentage, le versement de droits d’auteur est
assujetti à la TVA au taux de 5,5 %.

Cependant, les artistes bénéficient d’une franchise spécifique si leur chiffre d’affaires hors taxe de l’année précédente n’excède pas 37 400 euros. La franchise tombe si au cours de l’année le chiffre d’affaires hors taxe dépasse 45 800 euros. Cette franchise n’est applicable qu’en cas de renonciation expresse de l’auteur au mécanisme de la retenue à la source. La facture portera dans ce cas la mention « TVA non applicable, article 293B du Code Général des Impôts ».
Généralement, le débiteur des droits se charge de reverser directement au Trésor Public la TVA, en retenant à la source 4,7 % du montant TTC, l’auteur conservant le reliquat de 0,8 % qui lui est versé en plus du montant HT. En revanche, l’auteur ne pourra pas déduire la TVA qui grève ses achats externes.

3 - Sur le plan social

Sur le montant brut des droits d’auteur, seront en outre prélevées des cotisations sociales. Les parts “auteur” sont de 8 % de 97 % du brut H.T. (il s’agit des cotisations CSG - 7.5 % - et CRDS - 0.5 % -), et de 0,85 % du brut (il s’agit de la cotisation maladie, maternité, veuvage).

La part diffuseur (on entend ici par diffuseur la structure privé ou publique qui accueille l’auteur) est de 1 % du brut (taux applicable à ce jour).

En pratique, si le diffuseur rémunère pour la première fois en droits d’auteur, il suffit qu’il se fasse immatriculer auprès de l’ AGESSA (Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs, une seule adresse, à Paris) qui est l’organisme chargé par l’État de gérer le régime de sécurité sociale des auteurs. Le diffuseur versera directement à l’AGESSA l’ensemble des cotisations sociales.

Pour recevoir ses droits d’auteur, l’auteur établira une note de cession de droits
d’auteur, en obtenant auprès de l’AGESSA des exemplaires du Bordereau simplifié de déclaration.

Si l’auteur intervient pour rencontrer le public autour de son livre, ou plus généralement débattre sur son activité d’écrivain, il sera rémunéré par des « revenus assimilés aux droits d’auteur ».

En effet, dans ce cas, il n’y a pas de publication ni de représentation d’une oeuvre, et l’auteur ne peut pas être payé en droits d’auteur, censés rémunérer une création artistique.

Une circulaire du ministère chargé de la sécurité sociale en date du 2 avril 1998 donne la possibilité à l’AGESSA de prendre en compte les activités accessoires des auteurs telles que : participation à des débats, rencontres, en les payant en revenus dits « accessoires des auteurs ».
L’auteur devra remplir le Bordereau AGESSA relatif à la déclaration des revenus accessoires des auteurs.

L’ensemble de ces revenus accessoires sont soumis aux mêmes régimes fiscal et social que les droits d’auteur eux-mêmes.

Enfin, un auteur peut également être salarié du diffuseur, lorsqu’il existe entre eux un lien de subordination. En effet, l’existence d’un contrat de travail n’est pas incompatible avec le statut d’auteur. Cependant, le statut de salarié n’entraîne pas automatiquement cession des droits patrimoniaux de l’auteur salarié à son employeur.

La question des droits d’auteur relatifs aux oeuvres créés par des salariés pose des
problèmes importants en pratique et fera l’objet d’un futur article.

Un article de Myriam ANGELIER et Franck BENALLOUL
Avocats au barreau de Marseille