Un paysage de la librairie en PACA

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Quelques clés, données et repères sur la librairie en région Provence-Alpes-Côte d’Azur

Fin 2003, l’Agence Régionale du Livre PACA s’attaquait au recensement des professionnels du livre de la région. Les éditeurs ont tout d’abord fait l’objet d’une première analyse intitulée « Un visage de l’édition », livrée dans Dazibao n° 4 . En 2004, les libraires ont à leur tour été contactés, par le moyen d’un questionnaire envoyé à 461 adresses, extraites de nos fichiers, de ceux de Dilicom, du SLF et des Pages jaunes. Au moins deux relances ont été effectuées et nous avons reçu environ 200 réponses parmi lesquelles se trouvaient différents types de points de vente du livre : librairies de livres neufs, anciens, d’occasion, maisons de la presse, librairies papeteries, librairies ambulantes, grandes surfaces spécialisées, etc.

Pour livrer aujourd’hui une restitution de ces données, il nous a fallu extraire une liste. Sans données économiques, ni visite possible de l’ensemble des points de vente, le choix de ces librairies ne s’est pas fait sans mal. En effet, sur quels critères s’appuyer pour proposer une liste représentative d’un vrai travail de librairie, sachant que la surface ou le nombre de livres proposés ne sont pas significatifs à eux seuls ?

Nous avons choisi d’écarter les grandes surfaces spécialisées, les hypermarchés et autres surfaces multiproduits. Nous avons également écarté les librairies qui ne vendent que de l’ancien ou de l’occasion ainsi que les librairies internationales qui proposent des livres en langues étrangères, lesquels échappent aux lois sur le prix du livre en France. Nous nous sommes donc attachés aux points de vente dont le livre neuf est la principale activité et avons effectué une sélection parmi les librairies papeteries et les maisons de la presse particulièrement importantes.

Nous avons enfin comparé notre fichier à ceux des distributeurs Harmonia Mundi et Sodis ainsi qu’à celui de la plate-forme Prisme (merci à eux pour leur aide).

111 librairies composent notre panel représentatif. Cette étude permet de donner des ordres de grandeur du secteur dans notre région et une première vision de la diversité de la librairie en PACA. Les libraires pourront se situer par rapport à leurs confrères, et les autres professionnels y puiseront quelques repères.

Nous remercions ceux qui nous ont répondu et nous excusons auprès de ceux qui ne figureraient pas dans cette liste.

À propos de définition(s) de la librairie…

Tous les professionnels du livre s’accordent à reconnaître qu’il existe un vrai problème de définition de la librairie. Il est parlant à cet égard de rappeler que le Centre de documentation de la Direction du Livre et de la Lecture désigne la librairie comme « un objet statistique incertain ».

Les entreprises de diffusion du livre ont adopté une segmentation en niveaux de clientèle, que l’enquête 2003 menée par la Direction du Livre et de la Lecture et le Centre National du Livre intitulée Situation économique de la librairie de 1er niveau définit de la manière suivante :

”- le 1er niveau (parfois segmenté en « librairies A » et « librairies B ») ;

  • les 700 à 800 hypermarchés, qui bénéficient d’une équipe spécifique de représentants ;
  • le 2e niveau (4 000 à 12 000 points de vente selon les diffuseurs), qui regroupe les petits points de vente de proximité, les supermarchés et les magasins populaires.

Plus récemment, on a vu apparaître le terme de « 3e niveau » pour désigner les très petits points de vente et les points de vente occasionnels qui n’ont pas de compte ouvert chez les distributeurs et s’approvisionnent auprès de grossistes ou des plates-formes régionales des distributeurs.”

Par ailleurs, une des tendances de ces dernières années est la multiplication des points de vente du livre. Ainsi, les magasins de bricolage, les pharmacies ou encore les magasins de jouets pour enfants. Dilicom nous a fourni un fichier de… 3 000 points de vente du livre en région PACA !

Pour 2003, l’INSEE recensait 18 472 entreprises sous le code APE 524R (Commerce de détail de livres, journaux et papeterie) en France (Métropole + DOM TOM). La région PACA en compte 1947, ce qui la classe 3e derrière l’Île de France et la région Rhône-Alpes.

L’enquête du Ministère de la Culture explique plus précisemment le concept de librairie de 1er niveau :
« Le terme de “ librairies de 1er niveau ” vient de la segmentation des clientèles opérée par les entreprises de diffusion et désigne, selon les maisons, les 700 à 1 300 clients les plus importants (librairies et grandes surfaces culturelles), soit en termes quantitatifs (chiffre d’affaires réalisé avec les éditeurs diffusés), soit en termes qualitatifs (capacité du libraire à « lancer » un titre, travail sur le fonds des éditeurs diffusés, etc.).
À ce titre, les points de vente du 1er niveau, qui représentent en moyenne de 60 % à 75 % du chiffre d’affaires des diffuseurs, bénéficient de visites plus fréquentes des représentants et des remises commerciales les plus élevées. Pour simplifier, on dira que le concept de 1er niveau recoupe, pour le public des lecteurs celui de “ vraie ” librairie, c’est-à-dire des points de vente présentant un large assortiment de titres ou vendant essentiellement des livres. »

Cependant, la capacité de conseil au lecteur, de prise de commande, de recherche… ne déterminent pas l’appartenance d’une librairie à tel ou tel niveau. De plus, les frontières entre ces niveaux sont spécifiques à chaque diffuseur et varient considérablement selon leurs propres critères de classement et les éditeurs qu’ils représentent.

Indépendament des observations qui précèdent, ajoutons enfin qu’un maillage de librairies de proximité est indispensable pour que tous les publics, en particulier ceux les plus éloignés des grands centres urbains, puissent avoir accès à l’achat de livres.

Pour faire écho à cette problématique de définition de la librairie, nous avons choisi d’interroger huit librairies de la région. À partir du panel de l’enquête, nous les avons sélectionnées pour leur diversité en s’appuyant sur différents critères : la nature de leur fonds (spécialisé ou généraliste), l’appartenance à une chaîne ou non, leur situation géographique (départements et taille des villes), leur date de création, l’informatisation de leur stock.

La librairie Album, M. Rivolier, Saint-Laurent du Var, Librairie BD
La librairie Le Bleuet, Joël Gatefosse, Banon, Librairie générale
La librairie Charlemagne, Khaled Hafsi, Toulon, Librairie générale
La librairie Davagnier, Pierre-Marie Faure, Gap, Librairie générale
La librairie Holstein, Suzanne Savry, Avignon, Librairie ésotérique
La Nouvelle Librairie Française, Pierre Benassaya, Nice, Librairie générale
La librairie Païdos, Laurent Baudry, Marseille, Librairie sciences humaines
La librairie Regards, Molly Fournel, Marseille, Librairie sciences humaines et Arts
ont accepté de répondre à nos questions :

C’est quoi pour vous une librairie ?

  • **Librairie Album** : Ce sont des spécialistes du livre qui présentent l’actualité et un choix le plus large possible dans ce qui est édité.
  • **Librairie Le Bleuet** : C’est avant tout un lieu de rencontre.
  • **Librairie Charlemagne** : C’est un lieu où l’on ne met pas seulement des livres en avant mais aussi un travail. Le libraire doit mettre à la disposition du lecteur un assortiment le plus large possible ; mais cette diversité doit être accompagnée d’une capacité d’accueil, d’orientation, de renseignement et de conseil.
  • **Librairie Davagnier** : Un espace culturel convivial.
  • **Librairie Holstein** : Un commerce qui propose des livres. C’est une proposition de livres.
  • **Nouvelle Librairie Française** : C’est un endroit où l’on vend des livres.
  • **Librairie Païdos** : Un lieu où il y a des livres, où il y a une personne ou une équipe qui offre son regard sur le monde, à travers les livres. Un lieu où on est surpris, où il y a un échange. Ce n’est pas un lieu où on ne fait que consommer.
  • **Librairie Regards** : Un espace d’imaginaire et de savoir.

Qu’évoquent pour vous les concepts de Librairie traditionnelle et Librairie indépendante ?

  • **Librairie Album** : Librairie traditionnelle : Librairie de quartier **Librairie indépendante** : Entreprise, petit commerce
  • **Librairie Le Bleuet** : Cela me paraît difficile de différencier les 2. La librairie traditionnelle peut tout de même faire partie d’une chaîne. Une librairie indépendante se bat contre les gros diffuseurs trop influents.
  • **Librairie Charlemagne** : Une librairie indépendante doit être libre de ses choix, travailler avec les éditeurs qu’elle souhaite soutenir, avoir le fonds qu’elle désire. Le libraire indépendant est le chaînon essentiel à la vie du livre et à la diversité culturelle, même s’il est tributaire d’une politique commerciale. Les libraires indépendants sont la seule condition à la production des petits éditeurs. Dans les réseaux autres que ces librairies traditionnelles, la place du petit éditeur est plus que réduite. N’est-ce pas une forme de censure ?
  • **Librairie Davagnier** : C’est la même chose. Cela signifie un endroit avec une offre et un choix conséquent.
  • **Librairie Holstein** : Librairie traditionnelle : vieille librairie, rayonnages en bois, ambiance feutrée. Elle s’oppose aux grandes surfaces, avec un choix plus vaste et des livres de fonds. Librairie indépendante : ne fait pas partie des grandes chaînes de distribution.
  • **Nouvelle Librairie Française** : Pour moi, une librairie traditionnelle doit être indépendante, ce sont deux concepts liés.
  • **Librairie Païdos** : Librairie traditionnelle : est-ce à opposer à moderne ? mais alors qu’est-ce qu’une librairie moderne ? Librairie indépendante : indépendante par rapport à quoi ? on dépend de son banquier, de ses fournisseurs mais aussi de maisons d’édition…
  • **Librairie Regards** : Librairie traditionnelle : ça ne veut pas dire grand-chose, mais la librairie indépendante davantage : c’est le maintien de la diversité, liée à la sensibilité de chaque libraire, la non-appartenance à une chaîne. C’est la possibilité pour un libraire de faire ses commandes à l’éditeur de son choix, d’avoir une diversité d’ouvrages, mais aussi de s’implanter dans le lieu qu’elle souhaite.