Intelligence artificielle : les traducteurs et traductrices exigent la transparence

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ATLAS et l’ATLF – les deux associations représentantes des traducteurs et traductrices littéraires en France – alertent sur la propagation de l’intelligence artificielle (IA) dans leur domaine. Pour elles, « la traduction doit continuer d’être défendue comme une activité intellectuelle, nécessaire, bénéfique et profondément humaine. Un métier de l’esprit, un artisanat de l’écrit qui doit être plus que jamais soutenu, et rester indépendant des développeurs de logiciels qui n’ont d’intelligent que le nom ». Dans une Tribune de plusieurs pages, dont nous vous proposons un extrait, elles énumèrent les différentes problématiques soulevées par l’utilisation de ce nouvel outil et appellent les pouvoirs publics et les professionnels du livre à soutenir les traducteurs·trices et les auteurs·trices ainsi que leur métier.

« Nous défendons un métier et celles et ceux qui le pratiquent avec amour et savoir-faire ; il nous faut réagir maintenant, ne pas fermer les yeux sur cette automatisation et restriction de la créativité, lui résister, la refuser, la combattre.

Non, il n’est pas trop tard, et non, nous ne voulons pas réfléchir dès maintenant à comment nous « recycler », comment nous « réinventer », nous « reconvertir » pour nous plier à cette non-pensée aberrante de la rentabilité à tout crin. Voilà plusieurs décennies que les théories darwiniennes de l’évolution sur la sélection par la compétition ont été complétées par les observations des biologistes sur la coopération en tant qu’avantage sélectif. Il est temps de sortir de la foi aveugle en la compétition.

Nous refusons que cette technologie soit considérée comme de la traduction, car au contraire de la traduction, cette technologie lisse les textes, les voix et les pensées. Elle sabote la créativité nécessaire à l’épanouissement humain. Concrètement, utiliser ces logiciels à des fins professionnelles, c’est prendre le risque de nourrir et travailler gratuitement pour des multinationales et des licornes sans aucun scrupule éthique.

Nous refusons le diktat de l’uniformisation linguistique : non, une bonne traduction effectuée par une bonne traductrice ou un bon traducteur n’a pas à être invisible pour être jugée bonne ; elle doit vivre, respirer, reconstruire en soi tout ce monde qu’est le texte original, faire avec le différent, et le revendiquer.

Nous exigeons que les textes pré-traduits automatiquement soient mentionnés comme tels et une transparence totale quant à ces pratiques déjà en vigueur dans l’édition ».