Le podcast, une opportunité pour l'édition ?

Publié le

Interview de Justine Souque, coordinatrice éditoriale du magazine le POD et fondatrice du groupe Facebook Podcast & Littérature . Selon elle, le podcast est une véritable opportunité pour les éditeurs de promouvoir la lecture auprès d’un public de non-lecteurs et de petits lecteurs.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Lectrice et audiolectrice assidue, pendant mes études en Art, Histoire et Lettres, j’ai décidé très rapidement de devenir indépendante et d’apporter mon expertise dans l’adaptation des histoires en version sonore. Je travaille avec des éditeurs, des studios d’enregistrement, des sociétés de production et des particuliers.

Vous êtes la fondatrice du groupe Facebook Podcast & Littérature. Qu’est-ce qui a motivé la création de ce groupe ?

La nécessité absolue de décloisonner ce format novateur qu’est le podcast et cet art essentiel qu’est la littérature. J’en avais assez d’entendre d’un côté certains éditeurs ne jurer que par le papier ou, pour les éditeurs de livre audio, refuser de s’intéresser au podcast. Ce mode d’écoute est une réalité et une véritable opportunité afin de promouvoir la lecture auprès d’un public difficile à conquérir : les non-lecteurs et les petits lecteurs. Dans ce groupe Facebook, les membres partagent leur double inclination pour le son et les mots.

Dans quelle mesure le podcast peut-il être un levier d’écoute des livres audio ?

Les auditeurs de podcasts sont à l’affût d’histoires, ils en réclament toujours plus. Le public du livre audio est déjà là, avec ses habitudes d’écoute et son appétit grandissant, que demander de plus ? Il faut que les éditeurs de livres audio se rapprochent des pratiques de l’audio digital, et le podcast en fait partie. Qu’on ne dise pas qu’un podcast est court et qu’un livre audio long et qu’avec cette différence de durée, les deux formats ne peuvent pas se rencontrer… Ce qui compte, c’est la découpe : il y a plusieurs épisodes dans un podcast, et il y a des pistes sonores dans un livre audio. L’auditeur est donc habitué, grâce au podcast, à ce type d’écoute fragmentée. Le terrain est prêt.

Comment un éditeur de livre audio peut-il tirer parti du podcast ?

C’est le moyen de cibler un public plus jeune, de moins de 35 ans, et mobile, qui écoute le contenu audio surtout pendant les trajets en voiture. Et si une grande partie des lecteurs de livres audio sont en fait des lectrices, cette distinction homme/femme est beaucoup moins évidente quand on parle de radio ou de podcast. Comment profiter concrètement de l’aventure podcast quand on est éditeur de livres audio ? Sachant que les podcasts sont enregistrés à un rythme régulier et sont majoritairement écoutés entre 48 heures et une semaine après leur diffusion, les éditeurs peuvent jouer avec cette temporalité : parler de leur rentrée littéraire, de la sortie d’un livre, proposer l’extrait d’un livre en fonction des thématiques d’un podcasteur… Bref, le livre audio ne devrait pas se développer en ignorant le podcast, mais en en étant attentif à l’ampleur que prend ce dernier. Et là je ne parle même pas des atouts de créer un podcast en tant qu’éditeur, mais seulement de ceux en se basant sur des podcasts déjà existants.

Que pensez-vous des initiatives de plateformes numériques qui proposent à la fois podcast et livre audio ?

Ces plateformes ont compris la complémentarité de ces deux formats. Elles saisissent les enjeux économiques qu’il y a derrière : étoffer le catalogue auprès d’un public qui souhaite avoir du contenu audio à la demande et régulièrement renouvelé.

Vous êtes coordinatrice éditoriale du magazine Le POD, 1er magazine grand public au format poche dédié au podcast, envisagez-vous d’initier des passerelles avec le livre audio ?

Dès que je suis arrivée en juillet 2020, le premier défi a été de revoir complètement le “rubriquage”. Parmi mes propositions d’entrées de lecture, il y avait le livre audio. Nous parlons, dans la rubrique “Livre-toi”, des podcasts littéraires et du livre audio. Les éditeurs de livres audio ont, par ailleurs, leur place parmi nos annonceurs. Pour moi les passerelles sont évidentes, j’en suis intimement convaincue. Quand j’interviens, en tant que rédactrice ou conférencière, c’est pour consolider ce pont entre les podcasts (natifs ou replays) et les livres.


Interview de Justine Souque réalisée par Cécile Palusinski dans le cadre de la Semaine du Livre audio organisée par l’Agence régionale du livre Provence-Alpes-Côte d’Azur du 23 au 26 novembre 2020.