Calouan : itinéraire d'une ingénieure devenue autrice

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Installée dans le Luberon depuis 2002, elle y écrit et enseigne. Ses publications sensibilisent enfants et adultes aux enjeux environnementaux.

Ingénieure en environnement de formation, Calouan enseigne d’abord à l’université avant de se former à la pédagogie Montessori. Elle est l’autrice de nombreux albums de jeunesse, un recueil de nouvelles, un livre de botanique pour les adultes, et plusieurs romans pour les adolescents. Depuis 2002, elle y a repris son activité d’enseignante, cette fois en sciences de l’environnement auprès d’étudiants en brevet de technicien supérieur. Son dernier ouvrage sur l’écologie, Je prends soin de ma planète (éditions Grenouille, 2021), est un écoguide pour les jeunes à partir de 9 ans.


Agence régionale du Livre : Parlez-nous de votre formation initiale dans les sciences de l’environnement. Comment a-t-elle influencé votre travail d’autrice ?

Calouan : J’ai obtenu une licence et une maîtrise en chimie analytique et sciences de l’environnement. En dernière année, je me suis spécialisée en rudologie - le tri et tout ce qui concerne les déchets. C’était en 1992, et l’environnement n’était pas encore rentré dans les mentalités au sein des entreprises. J’ai eu un poste pendant un an chez Philips en tant qu’ingénieure d’environnement. Ils me prenaient pour la baba cool avec une fleur à la bouche - ce n’était pas du tout mon cas, mais pour eux l’écologie, c’était ça. Partager les enjeux environnementaux dans les consciences industrielles a été très difficile. Cette formation initiale correspond à mes valeurs. Un mot que je pourrais graver sur mon front, c’est « respect » pour l’environnement planétaire.

J’ai écrit un roman d’anticipation pour adolescents qui s’appelle Ozone (éditions Carlo Zaglia, 2016) dans lequel j’imagine que la couche d’ozone a fini par disparaître totalement. Malgré les alertes, les lobbyings étant plus forts, la catastrophe est vraiment survenue. C’est un monde où tout s’est effondré. Il y a deux types de survivants : un groupe qui s’est retrouvé modifié à cause des conditions à l’extérieur ; et l’autre qui s’est enfermé dans une grande surface et qui est resté comme vous et moi. Ils ne se soutiennent pas, ils se défient, se jaugent, veulent être les plus importants : une sorte de guerre civile éclate. C’est le message que je veux délivrer : le respect de la planète commence déjà par le respect de celui qui est à côté de vous, par laisser une place à tous, cesser d’apposer des étiquettes les uns sur les autres.

En arrivant dans le sud, je me suis installée dans une commune du Vaucluse où le maire avait été agriculteur. Il connaissait mon intérêt pour l’écologie, et m’a raconté - peut-être pour s’excuser - comment les viticulteurs ont été amenés à utiliser des pesticides, comment leur profession avait changé. Je voulais partager cette histoire parce qu’encore une fois, je trouve que c’est dommage de mettre des étiquettes et d’accuser l’autre. Les agriculteurs avec leurs pesticides, ils polluent, oui. Mais à l’origine, on les a coincés, ils n’ont pas vu venir les conséquences. C’était une obligation face à la faillite.


Vous faites aussi des interventions autour de vos livres en colonie de vacances et dans des établissements scolaires. Pouvez-vous me parler de cette partie de votre activité ?

Je fais différentes interventions en fonction de l’âge des lecteurs ou du public concerné. J’ai aussi différents livres que je peux présenter selon le contexte.

Pour prendre un exemple : grâce à mon écoguide, Je prends soin de ma planète, j’écris sur le spectre très large de toutes les difficultés écologiques qu’on retrouve aujourd’hui et je propose différentes activités aux jeunes pour les rendre acteurs. Nous discutons de tout ce qu’ils peuvent connaître autour de l’environnement, ce qu’ils font chez eux, quelles sont les choses dont ils ont entendu parler. On choisit ensuite différentes thématiques qui leur tiennent à cœur : le tri des déchets, le circuit de l’eau, les transports… et par groupes, ils écrivent une nouvelle. Le dernier jour, chacun lit sa production. Cela leur permet de se rendre compte que leur écriture peut sensibiliser et éveiller les consciences.

L’idée est toujours de partir de ce qu’ils savent déjà. Je n’arrive pas avec une connaissance toute faite. Ensuite, nous développons ensemble en introduisant de nouvelles informations.

Je réalise également des acrostiches avec le mot « écologie » ou « environnement » et les jeunes doivent trouver des phrases commençant par chacune des lettres du mot sur les problématiques environnementales. Pour les plus jeunes, je crée un calligramme avec des animaux du jardin, en partant de mon livret J’apprends à dessiner les animaux du jardin (éditions Grenouille, 2021). Ils dessinent pas à pas un animal dans son environnement grâce au petit texte décrivant son rôle dans l’écosystème jardin.

Je me considère déjà comme une autrice droite dans mes bottes, en adéquation avec mes valeurs, respectueuse de chacun. Après, je n’ai pas la prétention de pouvoir faire changer les mentalités - parce que quand on est engagée, on a souvent cet espoir-là. J’ai juste envie d’informer le plus honnêtement possible, de faire passer des informations, d’alerter avec bienveillance sur la dure réalité, de toucher des consciences et d’écouter les interrogations et doutes que l’on partage. Je ne conseille pas, je réfléchis en commun avec ceux qui veulent bien être attentifs à l’environnement.